L‘essoufflement de l’écriture romanesque

 

Par Adnan MOURI 

Chercheur chroniqueur

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«Un homme de progrès, c'est un homme qui marche, qui va voir, expérimente, change sa pratique, vérifie son savoir, et ainsi sans fin.»Jacques Rancière

«Ce n'est pas seulement notre ignorance, c'est notre connaissance qui nous aveugle.»Edgar Morin

 

Avec le romantisme des idées, l’écriture devient un genre noble qui essaie d’associer imagination et entendement sans oublier l’activité consciente et inconsciente qui peut  se réconcilier avec  l’échappement.

Il va sans dire que l’idée de création comme passion et patience de l’esprit permet au romancier de ne pas être rêveur, inspiré ou fantaisiste seulement mais un artisan aux prises « avec l’inflexible matière » et avec  une nécessité qui n’est pas une  négation ;à cet égard André Gide dira « l’art naît d’une contrainte, vit d’une lutte et meurt d’une liberté ».

La culture de l’écrit dégage un élan de réflexion. Que pourrait-on dire du côté sublime de l’écriture qui depuis la décennie noire a perdu de son éclat, de sa beauté, avec cette islamisation qui s’acharne à détruire les idées novatrices ? Le fanatisme du marché déprécie l’action culturelle en la noyant dans l’assujettissement à l’utilité, ainsi la logique du buzz devient légion.

Devant cette dégradation, le triomphe de la subjectivité essaie un tant soit peu de remplacer la paresseuse fluidité de la «  vacuité des sens » par une certaine production littéraire ; même si elle n’arrive pas à dépasser le souffle prophétique de la socialité primaire, elle tente toutefois de mettre en exergue quelques bribes d’altérité dans son discours.

Cette tentative d’écriture romanesque favorise un processus cathartique qui  secrète dans la communauté des écrivains des dogmes et devient à son tour une chapelle. Au fil de mes lectures, mon  regard se pose uniquement sur  l’aliénation  sociale qui  forclore l’inconscient. Est-ce que  l’imaginaire de l ‘écriture décolonise le sujet de  la servitude  ?

 Beaucoup d’auteurs n’arrivent  pas à se départir  de l’identification  imaginaire, le ballotage surmoïque tant oriental qu’occidental  oriente  une chaine  signifiante de l’oralité et de l’écriture qui  déprécie  l’intelligence  des situations.

  L’imaginaire moteur   trouve son  point de démarcation  uniquement   dans l’idylle sublimé  de l’imagination créatrice d’imagerie  mentale  avec  une certaine loufoquerie ; dès qu’ il  s’agit  de faire  une lecture sérieuse  en mettant des mots  sur  les maux , le symptôme subjectif  plonge dans les abimes  de la récusation  de l’inconscient.

Dans   ce  sens, Le hirak  romanesque  se coltinera  une montagne  pour  à la fin accoucher d’une souris ; le manque de rigueur et de travail  conceptuel   n’ont pas permis  de dialectiser  une aliénation signifiante et sociale .L’écriture ou bien le référant idéalisé se noie continuellement dans  les  routines de  « l’occirdentalisation ».

Dans ce cas de figure, peut-on   dire que le corps psychique de l’écriture est cadavérisé  par les relents d’une soumission implicite  mettant  en avant une  « modernité  liquide » ? Ce lien de discordance ne peut se subvertir par une dialectique  qui nous impose  de penser  l’impensé  d’une indépendance exempte de toute domination.

L’écriture  qui se veut subversive  ne dépasse pas  le souffle  prophétique de  la résignation , nous  citerons  quelques auteurs  qui  dépeignent une mollesse  psychique quant à  la confusion  entre  singularité  et individualité , à  commencer  par  le romancier Boujedra.

Essayer  de déboulonner l’impudeur pudique à travers des trivialités de sens  dans   son roman répudiation,  « belles fesses etc », ne  doi pas  limiter  la dimension de la sexualité  dans une forme de dialectique entre tradition/ modernité. Cet aspect  démontre qu’il peut  y avoir des similitudes  avec Kamel  Daoud  dans  ses  romans.

Qu’en est -il   de la sexualité e de  la femme ?Si on aborde  de façon Analytique ,  le  fait de  dire  que le rapport sexuel  n’existe pas  , cela explique  la chose suivante "Quand deux amants font l’amour, ils le font de manière très personnelle, par rapport à eux-mêmes, d’où la rescousse à  la  sexualité psychique  qui reste méconnue.

   La sexologie  prônée  dans  la trame  narrative  comme instance   libératrice appauvrit la sexualité humaine en la considérant comme une fonction qui rappelle le rapport entre une clé et la serrure à laquelle elle est censée être adaptée.

D’ailleurs dès que des symptômes  sexuels mettent en échec son savoir réducteur et technique, qu’il soit constitué de solutions chimiothérapiques, ou  de conduites comportementales, faisant appel au conditionnement « animalier » de type vétérinaire, La sexologie comme science prédicative ,  dénie et refuse l’inconscient, aux procédés hypnotiques et suggestifs, qui consolident la méconnaissance de la surdétermination du symbolique et renforcent l’obscurantisme en « jetant un voile », bien épais sur la sexualité.

En survolant  le volet de la  sexualité développé par l’écrivain Boujedra ,  il met son écriture sous les auspices de la révolution sexuelle qui  demeure marquée  par  le musellement ;   il rajoutera que  La sexualité et l’érotisme sont des thèmes qui reviennent souvent dans son  livre, et  que c’est son droit d’introduire du sexe dans ses  écrits pour offrir de la sensualité à ses  lecteurs ….. Allant même à reprocher à Kateb  Yacine son  « hermétisme sexuel » dans  Nedjma .

Il va sans dire que le mérite qu’on peut attribuer  à  l’écrivain est de le  voir faire  une petite  déambulation psychique, mais celle-ci  se fait ravaler facilement par  une forme d’idéologie. Le lyrisme grégaire du communisme se fait âprement sentir chez l’intellectuel.

 La prise en compte  de la perception de la gauche   demeure frelatée par la vacuité des sens qui   laisse  la pensée de Marx somnoler dans  la fétichisation irrationnelle de la dynamique sociale.

 L’écriture  et les ratages de la soumission affective.

Depuis l'avènement  du  Hirak , la résurgence  de l'insoumission à  l'ordre établi brasse l'air de la pente monolithique qui est en permanence en butte à  une socialisation de la révolte faisant le lit à  une mascarade hystérique.

Cet aspect pathologique du social asservit l'imaginaire  par la surcompensation narcissique  censée  combler la vacuité  intellectuelle dans laquelle les protagonistes de la démocratie  semblent  se complaire en prononçant  un discours à  l'identique de celui du maître  qui se noie dans une phraséologie  marxisante paupérisée, et confondue  avec le communisme primitif  défendu  par Platon .

A travers un excès  délimité  du climat « intellecticide » ambiant, l'action militante semble perdre pied et perpétuer  les ravages inutiles d'une contestation inaudible limite risible et fantasmagorique.

Dans ce cas de figure, les réseaux  sociaux constituent un tremplin du délire  qui désagrège  l'action militante celle-ci devrait faire advenir la dimension  du conflit dans le champ politique. Cette forme de contestation nous amène  à  nous interroger sur  la socialisation de la  révolte avant  de mettre en avant la socialisation de l’autonomie .

Comment prétendre à  une certaine autonomie face à  la résurgence  d’une servitude volontaire  qui accable  les militants de  l’écrit   en proie à une  forme de schizophrénie ? De ce fait, l'action culturelle sombre dans les abîmes. La socialité  de la culture militante pourrait être  une éclosion  et un moment vital,  si elle ne se laisse pas absorber par l'affect qui  obéit inéluctablement  à  l aliénisme pour  trouver refuge dans "un asile d'ignorance".

Christian  Maures disait dans son livre, « l’éducation populaire et puissance d’agir », que la culture n'a pas de portée émancipatrice. Pour ce philosophe, ce concept est dominé  par « une charge sémantique , la culture ce sont d'abord des styles de vie, ensemble de modèles  et représentations sociales», ainsi le groupe social s'entretient sous la forme "d'habitus" comme disait   Bourdieu selon  des dispositifs incorporés.

Pour faire valoir  une compréhension  « praxéologique »,il nous faudra débusquer  les lieux où  elle se niche et les lieux qu' elle occupe, dans l'organisation et la transformation  de cette dernière ; car dans ce cas de figure, l'assise  culturelle est aussi un langage,  ce que le sociologue  Claude Passeront appelle « les comportements  déclaratifs », ce qui peut laisser transparaître  selon la métaphore  de Bernard Lahore, "pour comprendre le social à  l'état  déplié  ,individualisé, il faut avoir une connaissance du social à  l'état  déplié ".

L’ écriture   romanesque   se fanatise uniquement  par le degré de « starisation »  en s’affichant  en tête de gondole dans les lieux de rencontre. De fait l’ art  de l’écriture s’inscrit  dans un processus d’identification et  ne pourra impulser  sa dynamique  que  par la subjectivité qui admet  le défaut  du « rapport sexuel ».

Enfin vouloir subvertir l'affect par une volonté  subjective   devra permettre selon la terminologie  de Spinoza, «  le dépassement  des passions tristes vers les passions les plus gaies qui mettent  en avant  notre puissance d'agir  en construisant  une nouvelle figure de l'homme »,comme le disait Michel Foucault.

 

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