
Covid:entre rationalité instrumentale et détresse psychique
Par Adnan MOURI
Chercheur chroniqueur
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Pour le moment, la covid 19 n’est familière à la raison que par son essence infranchissable, indéfinissable, mais toutefois pensable dans l’art médical.
La sensibilité forgée au contact de la pandémie permet au personnel soignant de comprendre la nature du virus qui leur est d’abord étranger présentant également une telle complexité et opacité qu’ il faudrait expérimenter. Dans un dialogue d’autant plus difficile, le virus est perçu comme mutant et ne laisse pas le temps au savoir médical de l’absorber.
Ceci dit, si l’on tient compte du point de vue de la libéralisation du service public qui impose une flânerie financière , le médecin sera le meilleur empoisonneur, autrement dit peut être le meilleur pour empoisonner plutôt que pour guérir ; nous reviendrons sur cet aspect qui concerne le secteur médical en Algérie . Cette marchandisation de tous les secteurs démontre la régression à l’infini du lien social qui favorise en soi l’aliénation de l’homme.
De ce fait, l’exigence de la rentabilité financière illustre la séduction pressante mais trompeuse de cet idéal technologique. Le travail humain déshumanisé par l’intelligence artificielle peut nous permettre de nous interroger sur la question suivante « est-ce que le travail peut rester humain ?
Dans ce sens, je rejoins l’analyse fort éclairante du sociologue Pierre Bourdieu, il tirait la sonnette d’alarme lorsqu’ il stigmatisait la perspective aussi illusoire que dangereuse selon laquelle l’évolution du système social paraît être déterminé par la logique du progrès scientifique et technique .
L’analyse défendue par Bourdieu, nous permet de survoler l’étude d’ Habermas « la théorie de l’agir communicationnel », le fil conducteur de sa pensée porte sur un triple niveau de réflexion quant à la communication , transmettre et renouveler le savoir culturel en intégrant socialement les solidarités sous l’aspect de la coordination de l’action , de ce fait la formation des identités personnelles se formeront sous l’aspect de socialisation..
Dans cette optique ma position se situe aux l’antipode de cette rationalité instrumentale qui favorise l’atomisation du corps social . En prenant comme appui le travail de l’école de Francfort ,cette rationalisation « connectique », nous permet de citer Adorno qui passait au crible ce fanatisme du marché qui met en « éclipse » le bon sens et l’écho règne du « technofascisme »
Pour le dire autrement, il s’agit de se pencher sur cette connexion quasi globale où « l’homo sapiens » est mis en danger par « l’homo réticulus » ; ce passage permettra de repenser la condition subjective qui sied chez l’être parlant A cet égard, l’essence humaine empreinte d’une identité dynamique valorisera les ressources linguistiques de la condition du « parle être », sans pour autant négliger la question du ratage qui est ancrée chez le sujet.
En battant en brèche, la communication instrumentale qui nous impose un dialogue impur , je dirai que si le langage n’est pas un code , c’est parce que sa structure donne lieu à l’équivocité et au malentendu. Ces ratages véhiculés par la parole ,le discréditent en tant que structure d’échange ainsi le souligne un bon nombre de psychanalystes «les adeptes du bouclage du champs ouvert par le langage se bousculent au portillon pour proposer des solutions techniques de colmatage , « aggravant la psychotisation des rapports sociaux ».
Pour illustrer mon propos , je cite l’article suivant paru dans le magazine Sciences Humaines ,« les robots pourront- ils aimer ? » Dans cet entretien , plusieurs chercheurs s’accordent pour dire que la neurobiologie a sous-estimé et dévalorisé ce qui est un être humain sujet parlant, « et là on renoue avec le travail de philosophie et sociologie en évitant de reproduire « quelque chose de l’humain qu’ on ne comprend pas .
Pour ne pas m’appesantir sur l’essor de la neurobiologie puis les neurosciences, je paraphrase le psychanalyste Gérard Pommier qui disait dans son essai , « les neurosciences démontrent la psychanalyse malgré l’heureuse conséquence du progrès technologique , la matérialité des neuroscience « est au service de la ségrégation », il donnera l’ exemple suivant « un enfant n’apprendra jamais à parler , si on discute pas avec lui , la parole est dépendante de la voix de la mère ».
Avant de conclure l’exposé sur l’immunité psychique , je souhaiterais mettre en exergue l’analyse du sociologue Honneth , qui a analysé la société du mépris , en faisant référence à l’anthropologue Mead ; il analysera la reconnaissance sous l’auspice de plusieurs types de sociabilité , à ce sujet on pourra voir que l’estime et la reconnaissance « fondent les relations juridiques et sociales ».
Ces derniers temps, le monde social ne voulait plus accepter cette perpétuelle errance qui faisait des peuples des témoins passifs devant l’atomisation du corps social.
Depuis une année, l’éveil devient sans cesse une passion renaissante qui traduit dans son sein « dynamique pessimisme de la raison et l’optimisme de la volonté » pour reprendre Gramsci.
Dans la continuité du renversement de la prolétarisation de l’imaginaire, le lien social permettra de rééquilibrer « des situation inégalitaires », toutefois si le combat de conscientisation marquera l’impression d’une émancipation solide en permettant « de démocratiser la démocratie », sans se fourvoyer dans la mystification des peuples.
Sur cet aspect, nous pouvons dire que « le peuple est divisé contre lui-même », comme le dit à juste titre le psychanalyste Gérard Pommier, « il garde sa première enfance, l’amour du père de grandir avec lui et contre lui ».
Au fil des ans, le capitalisme a enraciné l’idée de « servitude salutaire », pour le dire en terme foucaldien, le pouvoir de la financiarisation est une force affectant d’autres forces en vu d’imposer son emprise, autrement dit « , la dictature de l’actionnariat aura pour principale mission de conduire les conduites ».
Selon l’approche foucaldienne, le fameux pouvoir ne s’exerce pas sur des peuples opprimés où les déterminations sont saturées, mais sur les sujets libres qui ont devant eux, un champ de possibilités.
Dans l’essai du psychanalyste Marx Freud , « occupons les ronds-points », le psychanalyste Pommier nous parlera de la mystique de la marchandise qui fera un matérialisme en décrivant le sadisme, le masochisme et le voyeurisme ; pour le psychanalyste, les classes dominantes ne veulent pas faire des bénéfices seulement mais écouter des larmes ;qui ne se rappelle pas les paroles abjectes du PDG de France télécom, « le suicide devient une mode ». En un mot le sadisme comme jouissance perverse précarise le sujet.
Associer le virus du corona à la crise du capitalisme n’est pas le fait du hasard quand on voit comment la financiarisation aliène la force du service public tout en créant une insécurité sociale, pour reprendre le sociologue Robert Castel.
Dans ce sens, le philosophe Emmanuelle Brassart nous fera savoir que l’épidémie est nouvelle, le type de virus découle des mutations écologiques de la mondialisation néo-libérale .Autrement dit les saccages des milieux naturels du fait de leur surexploitation.
Cette analyse nous renvoie à Marx qui a fait cette distinction sur l’objectivation du tissu de l’aliénation, car selon lui, le concept d’objectivation met un processus qui permet à la condition humaine de « s’extérioriser dans la nature en vue de la transformer », en un mot pour reprendre Marx, « la nature devient grâce au travail l’expression de l’humain.
Dans ce cas de figure nous constatons à l’instar de certains philosophes et sociologues tels que Arendt , Habermas qui mettent en avant « la façon dont l’idolâtrie de la technique modifie le rapport de la société à l’individu et de l’individu à la société qui fait penser que le tout doit être pensé en machine. »
Pensons à, l’arrogance dogmatique de la technologie qui met en place un effet progression/ régression ; cette langue d’Esope encouragera à son tour la rationalité instrumentale.
l ‘essor de la neurobiologie qui se prélasse dans la médiocrité ambiante. Par Le fondement de cette science, la subjectivité n pas droite de cite, dans ce cas de figure nous interrogeons la santé mentale qui ne peut pas être malade car il n Ya ni agents bactériens ni viraux qui peuvent rendent malade le mental contrairement au cerveau qui peut être malade
Nous pourrons dire que l’aisance neurobiologique ne peut trouver son salut que si le savoir neurobiologique reste à sa place en diagnostiquant des maladies comme l’Alzheimer, l'épilepsie, les
Comme le disait le psychanalyste Roland Gori « La sécurité par le gouvernement de la technique tend à remplacer le soin humain."
Devant l’essence culturelle continuellellement mouvante l’invention du progrès technique introduit une double médiation « entre lui et la nature puisqu’il fabrique des outils à fabriquer des outils ».ceci dit , cette intelligence fabricatrice de la technologie est sujette à caution .
De ce fait, l’aspect moderne de la technologie et son efficacité « sur la maitrise de la nature » nous permet de comprendre un second aspect du problème lié aux enjeux moraux du progrès. Technique.
En cela nous rejoignons l’analyse de Marcuse qui disait dans l’homme unidimensionnel que la société s’est produite « dans un ensemble de choses et de relations qui étaient de plus en plus techniques y compris qu’ on a utilisé l’homme techniquement. La rationalité technologique et scientifique et l’exploitation de l’homme sont liés l’une à l’autre dans des formes nouvelles de contrôle social »
Dans ce cas de figure nous constatons à l’instar de certains philosophes et sociologues tel que Arendt , Habermas qui mettent en avant « la façon dont l’idolâtrie de la technique modifie le rapport de la société à l’individu et de l’individu à la société qui fait penser que le tout doit être pensé en machine. »
Pensons à, l’arrogance dogmatique de la technologie qui met en place un effet progression/ régression ; cette langue d’Esope encouragera à son tour la rationalité instrumentale qui comprend selon les termes du philosophe Eric Sadin « la siliconisation du monde ».
Pour terminer la première partie de l’exposé consacré à la rationalité instrumentale, je ferai mienne l’analyse du philosophe Canguilhem sur le normal et le pathologique devant la vie qui est une lutte contre l’entropie (= mécanisme qui nous permet d’éviter une perte d’énergie), la destruction, la mort. « Si la normalité est donc liée à la normativité, le pathologique est au contraire une réduction de cette normativité. « La maladie serait une réduction de la marge de tolérance des infidélités du milieu » CANGUILHEM en conclut que « être normal c’est pouvoir s’adapter aux changements ».
Enfin, pour libérer la vie sociale et économique de l’aliénation de l’évaluation, le rêve permet de rompre avec cette impossibilité de la parole.
Ainsi devant la nature du degré de « reconnaissance » nous devons mesurer l’impact du langage sur le corps. Ce « traumatisme » serait continuellement indépassable « puisque rien ne peut délier un être parlant de son assujettissement au langage quelle que soit la pathologie qu’il s’offre pour s’en libérer .A cet égard , il est indéniable de mesurer l’impact de la détresse psychique à travers l’idée de l’inconscient qui lui est consubstantiel.
Confinement et détresse psychique
En définissant l’angoisse comme affect composé de deux aspects , de perception ,de sensation de « plaisir et de déplaisir » et de décharge motrice , nous pouvons déceler aussi un « symbole amnésique » qui traduit une expérience traumatique.
Dans le confinement on peut prendre deux aspects qui ont un impact sur la condition humaine.
Le premier impact se traduit par l’effet de conscientisation qui aide le sujet à se prémunir contre le danger lié au covid , par contre, le deuxième aspect mesure le degré d’impuissancialisme , au-delà de l’injonction de rester chez soi qui renforce « la dictature sanitaire ».
Le principe hégémonique que tente d’imposer les pouvoirs en en place , me font penser à l‘analyse du philosophe Foucault dans « surveiller et punir », une conception mortifère de la micro pénalité illustre la tyrannie de l’incompétence .
Comme la pornographie capitaliste tente de gadgétiser les sentiments humains, même dans cette période qui s’avère sulfureuse, je propose de réfléchir sur le rêve pendant la période du confinement. Pour dépasser les égarements du charlatanisme nous pouvons relire interprétation du rêve chez Freud ; dans son essai, on pourra dire que l’interprétation aura pour rôle de jeter un pont entre les deux instances qui s’excluent l’une l’autre.
Le psychanalyste tente à partir du récit que fait le rêveur d’établir les pensées du rêve qui révèlent le sens de ces derniers. L’interprétation à travers une clinique de la parole vise la formulation d’un désir inconscient qui est à l’origine du rêve, mais ce dernier ne porte pas seulement sur cet aspect car l’analyse porte sur les actes manqués les mythes , religions etc .
Freud a bien montré le rôle et les difficultés de l’interprétation , ce qui amène le sociologue Bernard Lahire de faire une étude sur la sociologie du rêve, en partant d’une reconnaissance et critique à l’égard de l’enseignement de Freud ; j’ouvre cette parenthèse pour dire aux adeptes de la normalité névrotique que le sujet de la psychanalyse se réinvente continuellement .
Aborder la dimension psychique en Algérie demeure un chemin semé d’embuches , d’une part l’esprit traditionnel empreint de rationalité du mal trouve refuge dans le délire charlatanesque et d’autre part la modernité liquide chosifie les rapports humains . Cette soft barbarie, par la fumisterie ambiante de la neurobiologie tente de réduire le sujet humain à un rat de laboratoire sans pour autant essayer de comprendre ce qu’est la pathologie.
Autrement dit, Se libérer efficacement d’un symptôme (subjectif) nécessite d’analyser sérieusement – le temps qu’il faut- sa construction de celui /celle qui se plaint, est totalement responsable. « Responsable signifie avoir à en répondre, à en dire quelque chose et ne pas le mettre entre les mains de ceux qui sont censés posséder –par leur prétendu savoir- le secret et la clé du symptôme ».
Pour l’enseignement de la psychanalyse freudienne voire LACANIENNE « Si cette méthode est valable en médecine somatique, elle est complètement invalidée par la structure subjective, spécifique à l’être, dont l’humanité tient à ce qu’il est parlant ».
Enfin, Il faudrait dire que la périlleuse gymnastique qui détermine cette dépendance effrénée découle du fait qu’il y a un refus de couper le cordon ombilical avec cette logique de pulsion de mort analysée et théorisé cliniquement par Freud , à cet égard Valentine Faure dira « La « pulsion de mort » a cent ans et, pendant la pandémie de Covid-19, elle se porte bien…
Adnan MOURI
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- كتب بواسطة: مسير الموقع
- انشأ بتاريخ: 02 أوت 2021